Mutations Glaciaires
En 1985, Gallimard s’associe à Télérama pour publier un magazine à destination des 11/16 ans : Piranha, "le journal qui vous dévore". Le concept est simple : un magazine culturel + un roman + un jeu (avh ou jdr). Mais, certainement parce que la revue n’a pas eu le succès escompté, elle s'est éteinte au bout d'une année.
Cinq de ses numéros possédaient un jeu de rôle. Parmi ceux-ci, Mutations glaciaires, paru en novembre 1986. Une suite fut éditée dans le numéro suivant : La Cité de verre. Une troisième partie devait conclure cette série, mais le numéro n’étant jamais sorti, sa teneur en reste un mystère.
Comme le nom du jeu le laisse supposer, la Terre vit maintenant une ère importante de glaciation. Elle a entraîné une métamorphose géopolitique et sociale importante de notre société. Afin de se protéger du froid intense, on vit dans des villes-bulles plus ou moins indépendantes. Heureusement, la technologie n’a pas périclité et a permis à l’espèce humaine de résister face à ce fléau. Mieux que ça, elle a évolué et des robots lui permettent de maintenir son bien-être, voire de veiller à sa protection. Dans le même temps, des mutants commencent à apparaître en ville. Ces anomalies génétiques entraînent une violente répulsion, et des brigades anti-mutants voient rapidement le jour.
Il n’en faut pas plus (de toute façon, ne cherchez pas : il n’y en a pas plus !) pour se lancer dans l’aventure. Le jeu propose d’ailleurs plusieurs aventures, mais elles sont très courtes - on devrait plutôt parler d’introductions. Elles permettent de découvrir deux facettes du monde de jeu : serez-vous le chasseur ou le fugitif ? Dans le premier cas, vous êtes un anti-mutant, et il vous faut rattraper des mutants qui viennent de s’évader d’une base secrète. Dans le second cas, vous êtes un mutant et vous devez vous évader d’une base secrète où vous êtes prisonnier.
Tout cela reste simple et largement suffisant pour tester le jeu. Tester, car, et c’est là le côté énervant du jeu, on nous y annonce plusieurs fois qu’il n’est qu’un préambule à une suite à venir dans des prochains numéros du magazine… mais l’un d’eux, on le sait donc, ne verra jamais le jour.
Évidemment, on ne peut pas parler de ce jeu sans évoquer La Compagnie des glaces, le jdr de Fabrice Cayla et de Jean-Pierre Pécau. D’autant plus que ce dernier est sorti quelques mois avant (coïncidence ?). On avait reproché à l’époque à la Compagnie des glaces, le jdr, son austérité, sa présentation bancale et surtout son inutile et relative complexité… En ce sens, Mutations glaciaires aurait pu être une alternative digne d'intérêt.
Ceci dit, Mutations glaciaires est un peu frustrant en ce qui concerne la création de persos. Il n’y en a pas, on joue avec des pré-tirés. On n’y trouve pas de listes de mutations par exemple, ce qui est dommage puisque c'est le titre du jeu. Un poil plus de généralité sur les dessous et les aboutissants du monde auraient été bienvenus… Peut-être que ces sujets devaient être abordés dans la troisième partie, mais en l’absence de celle-ci, on en est là ! Ces manquements invitent à se demander si Mutations glaciaires atteignait vraiment son objectif, à savoir, initier les jeunes aux jdr.
Malgré tout, j’ai pris du plaisir à lire cet ancêtre qui fleure bon les années 80. Mutations glaciaires, en plus de proposer un univers ni tout blanc, ni tout noir, permet de jouer les rôles opposés. On peut penser à INS/MV qui apparaitra 4 ans plus tard ou encore au génial Psy*run où l’on joue soit les poursuivis, soit les poursuivants. Je peux me tromper mais, à ma connaissance, Mutations glaciaires est un des premiers jeux à directement offrir cette possibilité.
Imparfait mais intéressant, Mutations glaciaires est une curiosité rôlistique qui rendra peut-être nostalgique les plus anciens d’entre nous. À réserver aux collectionneurs.
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Bonus : Pour avoir une idée de ce que ce jeu peut rendre, vous pouvez écouter une partie (précédée par une critique sans pitié du magazine !) par l’équipe du podcast PDVELH : clic !
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